Du Yahvisme au sionisme. Dieu jaloux, peuple élu, terre promise : 2 500 ans de manipulations, livre publié en 2016 chez Kontre Kulture, lu et apprécié, malgré des passages étonnants, comme celui sur le récentisme, que Laurent Guyénot a approfondi depuis, dans un petit libre publié en 2021. J’en ferais peut-être un jour une recension si je le récupère un jour…

Des questions à Laurent Guyénot

Vous défendez la thèse que le sionisme est d’inspiration biblique. Pouvez-vous résumer vos arguments ?

Vous qualifiez le Dieu biblique Yahvé de Dieu sociopathe ou psychopate. Qu’entendez-vous par là ?

A chaque fois que les Hébreux sympathisent avec d’autres nations au point de se mêler à leur vie religieuse (la vie sociale étant inséparable de la vie cultuelle), Yahvé les punira, et il le fera en envoyant contre eux, précisément, d’autres nations. La main tendue par autrui est un piège mortel. Celui dont tu cherches l’amitié est ton pire ennemi. Ce principe inscrit dans l’idéologie yahviste enferme le peuple juif dans un cercle cognitif vicieux, les empêchant de tirer la seule leçon sensée de leur expérience : que les échanges favorisent la bonne entente des peuples. […] Selon la Bible, le peuple élu n’a d’obligation qu’envers Yahvé, jamais envers ses voisins. […] Depuis deux mille ans, les Juifs se voient constamment rappelés par leurs élites que les persécutions dont ils sont victimes sont le résultat, non pas de leur comportement blessant à l’égard des Gentils, mais au contraire de leurs efforts pour vivre avec eux en bonne entente, efforts assimilés à une infidélité envers Dieu ou envers leur destin de “peuple séparé”. Le peuple se rebelle parfois contre cette logique catastrophique [… et le] rapport de force entre une élite légiférant au nom de Dieu et un peuple perpétuellement rebelle est bien la tension fondamentale de l’histoire juive, car elle est au coeur de la mémoire juive conservée dans la Bible.

P. 64-65

Le Judaïsme est-il une religion ou bien une identité nationale ?

Le judaïsme aurait inventé le Dieu universel, et du même coup l’humanisme. [… Or,] le Dieu universel inventé par les Juifs est en réalité un dieu tribal particulièrement jaloux saisi d’une rage exterminatrice pour tous les autres dieux, et son universalisme n’est que le déguisement de son suprémacisme et de son mépris pour tous les particularismes non juifs, […] une fable destinée à enfumer le Goy. C’est pratiquement dit par Aaron David Gordon, fondateur du parti sioniste Hapoel Hatzair (Jeune Ouvrier) : “nous crions toujours le mot Humanité plus fort que les autres hommes, non parce que nous avons une éthique supérieure aux autres, mais parce que ‘Humanité’ est une abstraction, un concept en l’air : dans la vie il n’y a que les peuples.”

P. 386

Les Juifs n’ont-ils pas inventé le monothéisme ? N’est-ce pas un progrès civilisationnel considérable par rapport au paganisme ?

Le monothéisme de la Torah n’est tempéré par aucun dualisme. Il n’y a pas trace dans la Torah d’une lutte cosmique entre deux principes, comme dans le mythe d’Osiris ou dans le zoroastrisme perse. La tension fondamentale n’est pas entre le Bien et le Mal, mais entre Yahvé et tous les autres dieux. Le serpent qui tente Eve au Jardin d’Eden disparait à jamais de la Bible après cela : il n’a pas de consistance ontologique. Le “diable” ne fera son apparition que dans les Evangiles, et “Lucifer” plus tard encore, sur la base d’une exégèse tendancieuse d’Isaïe 14,12 dans la traduction latine (Vulgate). Quant à “Satan”, ce n’est que dans la tradition chrétienne qu’il deviendra l’ennemi éternel de Dieu. […] Dans l’Ancien Testament lorsqu’il est assimilé à un principe destructeur, Satan se distingue en fait mal de Yahvé lui-même. […] C’est toujours Yahvé qui frappe non seulement les ennemis d’Israël mais aussi Israël lorsqu’il a démérité à ses yeux. C’est lui qui déclenche les guerres, les épidémies et tous les fléaux imaginables. […] Yahvé est la source du bien comme du mal. (Il s’en suit logiquement, selon une école kabbalistique, qu’on peut le servir aussi bien par le mal que par le bien.)

P. 52

Vous affirmez que l’idéologie de la Bible hébraïque est matérialiste. Mais la vie après la mort fait partie de la croyance de la plupart des Juifs pieux. Que répondez-vous à leur objection ?

Quelques citations

L’histoire de Joseph endettant jusqu’au servage les paysans égyptiens confirme que l’enrichissement des Juifs par l’endettement des Gentils est un idéal biblique. Ce récit profondément immoral, mais tout à fait central dans la saga du peuple élu, garantit la bénédiction divine sur tous les abus de pouvoir pratiqués contre les étrangers. Elle illustre aussi une leçon que les Juifs appliqueront efficacement tout au long de leur histoire.

P. 62

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L’ennemi numéro un du Christ est bien le judaïsme, dans ses composantes sacerdotale-financière, pharisienne-puritaine et zélote-antiromaine (dans l’ordre). Et tout concourt à montrer que Jésus fut victime d’un complot des élites juives de Jérusalem, qui se sont arrangées, par des “faux témoignages” et des citations sorties de leurs contextes (Matthieu 26, 59-61), pour faire éliminer par les Romains un pacifiste opposé à leur chauvinisme anti-Romain (et anti-Samaritain, voir Luc 10, 29-37). En le dénonçant comme un ennemi de Rome, ces élites juives ont de surcroît voulu donner des gages de leur loyauté aux autorités romaines, avec une hypocrisie machiavélique.

P. 98

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Que le Christ soit en quelque sorte le sosie mythique d’Osiris, et que le succès foudroyant de son culte s’explique largement par cette ressemblance, sont des vérités que l’Eglise s’est de tout temps efforcée d’occulter.

P. 104

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On peut considérer le courant apocalyptique [dans les écrits canoniques] comme une rejudaïsation du message évangélique, sous l’influence d’une tournure d’esprit étrangère à Jésus. Cela n’est pas sans importance, car ce courant à aujourd’hui profondément dénaturé le christianisme dit “évangélique” issu d’une seconde Réforme anglo-américaine, et a contribué à en faire un allié objectif du militarisme américano-sioniste (…). Ces chrétiens qui appellent de leurs voeux la Fin du Monde sont profondément imprégnés de fantasmagorie apocalyptique.

P. 109

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La capacité d’Israël de manipuler les Etats-Unis, par le contrôle des grands médias couplé à des opérations psychologiques de grande envergure (…) est sidérante. Elle devient conceptualisable à la lumière de ce que Robert Hare nomme le “lien psychopathique”. Elle devient même prévisible dans une certaine mesure, si l’on sait que le sociopathe n’a aucune capacité à se remettre en question, aucune limite à son appétit de pouvoir, et aucun remords à entraîner les autres dans la ruine pour sauver sa peau. C’est ainsi qu’on peut interpréter le chantage à l’apocalypse nucléaire, qu’Israël exerce sur l’Occident depuis les années 1970, sous le nom d’“opération Samson”, et que Golda Meir résuma en 1974 en déclarant que, dans l’éventualité d’une défaite, son pays “serait prêt à entrainer toute la région et le monde entier avec lui”. […]
En parlant d’Israël comme d’un “Etat sociopathe”, je ne vise pas, bien entendu, les Israëliens en général. Ceux-ci, et tous les Juifs du monde qui soutiennent ardemment Israël, sont les premiers manipulés par leurs élites, et ils ne participent de cette sociopathie collective que dans la mesure de leur soumission à ces élites.

P. 397

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